Le joueur de Gambit, besogneux et approximatif (mais volontaire et systématique) que je suis, avait décidé de se lancer dans l’aventure de la promo, à mon humble niveau, sur un premier critère assez classique mais qui recelait finalement un peu de sens littéraire et symbolique.
En effet j’ai découvert Lou de Laâge au théâtre, dans une pièce tirée des « Deux étendards » de Lucien Rebatet condamné à mort à la Libération ... (etc etc si j’ose dire car là on est sur du sulfureux de chez Sulfureux )
Elle y jouait le rôle d’Anne-Marie, personnage central que tous les lecteurs de ce chef d’œuvre adorent et cela quelques soient les orientations personnelles et la fin du livre aide à cela...
J’avais aimé cette pièce et, cerné pas ceux nombreux qui l’avaient détestés, j’avais pu néanmoins constater à quel point ils reconnaissaient qu’elle jouait sa partition très justement.
Une icône était née.
En parallèle nous savions tous depuis de nombreux mois, via France Echecs essentiellement, qu’un film était en cours de préparation, que Joachim Jo semblait suivre l’opération de très prés, qu’Élodie Namer que je ne connais pas était à la manœuvre ... et que je risquais fort d’y retrouver ma nouvelle égérie.
Il me faut être clair, l’amitié réciproque qu’il nous plait de cultiver à notre rythme avec Jo a beaucoup joué dans la fascination qu’au fil du temps j’ai pu nourrir pour ce nouvel objet cinématographique.
Et c’était bien là le risque.
En un sens j’ai le vice du jeu dans la peau, il y avait du pari dans mon approche.
Oui mais voila il y a un Hic aussi et même plusieurs..
Des différents journaux qui se présentent quotidiennement ou hebdomadairement dans ma boite aux lettres il y a :
Libération (à qui je pardonne sans difficulté le virage éditorial en matière Politique, vu que je prends toujours plaisir à lire ceux avec qui je suis en désaccord, mais...) à qui, et je leur ai écris, je ne pardonnerai jamais d’avoir supprimé l’excellente chronique quotidienne de Jean-Pierre Mercier.
Également le Canard Enchainé dont je me suis séparé pendant de longues années considérant qu’ils sont loin d’avoir les fesses propres dans le suicide de Pierre Beregovoy, je m’en souviens bien.
On peut dire que ces 2 journaux, ainsi que Le Monde dont la consultation quotidienne électronique au moins partielle m’apparait nécessaire mais également Télérama, que je ne lis jamais n’étant pas un Catholique très pratiquant, n’y sont pas allés de main morte et c’est un euphémisme.
J’ai appris en revanche à la lecture de leurs chroniques chlorhydriques sur « Le tournoi » un nouveau concept celui de Teen-Movie.
Ces deux termes ne posent aucun pb de compréhension, et l’aspect Teen ne m’effraie pas du tout vu que que je viens à peine de sortir du spectre temporel que ce mot recouvre.
Je ne savais pas en revanche qu’existait ce créneau en tant que tel comme catégorie du « Cinéma » !!!
J’ai forcément rapidement percuté et réagit ensuite exactement comme Orouet :
Pour un joueur d’échecs lambda, a fortiori un joueur régulier ayant quelques tournois sérieux à son actif il était plus qu’important qu’un certain nombre de situations irréelles n’apparaissent. Good job Jo. On peut toujours j’imagine discuter au détail mais le contrat est rempli. C’était je crois le principal écueil à éviter.
Après c’est un film et pas un documentaire (et c’est précisément ici qu’à mon avis beaucoup de critiques acerbes commettent le contre-sens dans l’analyse).
Et c’est à cette nuance que le film devient un film qui pourrait faire date.
C’est au fond une métaphore à multiple facettes du monde des échecs qui en dit autant sur ses membres que sur l’état d’une génération.
Les clichés ? Mais bien sur qu’il y en a, un paquet même ! Et Élodie Namer a de mon point de vue l’intelligence cinématographique de les prendre, de les regarder de les intégrer et finalement de les « rendre », précisément, cinématographique.
Le rapport aux mômes plutôt doués dans le milieu échiquéen ? La réalisatrice s’empêche même de filmer la scène que j’attendais, celle de Cal giflant sans s’excuser le Picatchou à roulettes. Elle s’empêche de filmer également les comportements pénibles des pères de pseudo génies qui sont à domicile partout dans les tournois et reniflent la névrose à plein nez. La leur ou celle, à venir, de leur progéniture ...
De cela elle doit être remerciée. En revanche le film, sans être dans le documentaire donc, rend bien LA QUESTION délicate qui plus ou moins en ronge beaucoup : quid de la précocité aux échecs ?
Le lien Intelligence/Echecs ? Élodie Namer ne tombe pas dans le panneau et cela sans éluder ce que l’on pressent bien comme étant le soubassement de vanités si fréquentes et si pathétiques.
Le deuxième sexe sur l’échiquier ? Merci Lou.
Enfin la pirouette reste la toile de fond que l’on devine à savoir le formidable amour collectif du jeu dans un collectif de joueurs pourtant ultra clivé mais dont la capacité à la résilience semble être une seconde nature...
Avec mon caractère particulier j’en suis même une des preuves vivantes.
Poursuivons...
_ Le coté potache ? Joueurs obsédés des paris et intoxiqués de jeux ? Oui ça existe et là aussi le transfert du réel à la toile est bien maitrisé.
Il me semble que la réalisatrice, bien aidée par l’’équipe qu’il fallait avoir à ses cotés avait comme projet de « choper » l’essentiel du monde des échecs, la substance (au sens étymologique), l’ὑποκείμενον même (je sais qu’elle a fait Hypokhâgne alors je me lâche...)
Les vrais mauvais points maintenant.
Je n’irai pas (malgré l’excellente scène avec le chapeau vert) à la piscine avec Libi [1], dites-lui d’arrêter de me relancer par mail.
Jo, le Mat en 5 j’aimerais bien disposer du pgn
MVL souriait étrangement dans son passage à l’écran on aimerait savoir pourquoi....
Le clin d’œil qui m’est adressé personnellement (c’est manifeste) en tout début de film ( en gros « Est-ce que tu coucherais avec moi si j’étais 1500 » ce à quoi l’autre répond « et toi si j’étais 1700 » ne peux s’apprécier qu’à l’aune de mon actuel classement....
Non vraiment il faut y aller c’est généreux, drôle, léger sans être futile et en plus la Pirc est une bonne défense et cal évoque même avec bonheur l’hypothèse de la moderne...